Concombres de serre

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Production


Le contenu qui suit est issu de :

Oeuvre originale : Weill, A. et J. Duval. (2009). Guide de gestion globale de la ferme maraîchère biologique et diversifiée. Équiterre.

Révision : Boudreault, D. et Gilbert, P.-A. (2022).

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Après la tomate, le concombre est la deuxième culture la plus importante en serre. Il est possible d'en cultiver différentes variétés. Les plus populaires sont les concombres anglais et les concombres libanais. Il s'agit de fruits apyrène (sans graines) et parthénocarpique, signifiant que les fleurs n'ont pas besoin d'être fécondée. Sur les sites de semenciers anglophones, il faut chercher la mention "seedless". De nombreuses variétés destinées aux serres n'auront que des fleurs femelles sur le plant. Leur peau est également plus mince, ce qui fait en sorte qu'il est très apprécié sur les marchés. Il est aussi fréquent de voir des des concombres de type américain en serre, tout est une question de mise en marché et de réponse à la demande de la clientèle.

CHOIX DES VARIÉTÉS

Pour le concombre anglais, les principales variétés rencontrées sont: Kalunga, Verdon, Eldora, Logica et Tyria.

Pour le concombre libanais deux variétés sont principalement utilisées. La première est Jawell pour les cultures printanières hâtives, alors que Katrina est plus utilisé en été ou à l'automne.

Dans le concombre américain, le Corinto et le Paraiso donnent de bons résultats.

Il est possible de greffer aussi dans le concombre, mais compte tenu des difficultés à lutter contre les chrysomèle rayée du concombre et le flétrissement bactérien qu'elle transporte, cette pratique est peu utilisée.

Calendrier de production et travail quotidien

Le calendrier de production du concombre est différent de celui de la tomate, car cette culture est plus rapide. Il faut compter 50 jours entre le semis et la première récolte, ce qui représente environ la moitié du temps pour récolter une première tomate. Les transplants seront prêts à être transplantés au bout de 21 jours.

Le tableau suivant présente un exemple typique de calendrier de production de concombres de serre sur une ferme maraîchère diversifiée. La première récolte est estimée au 1er juin. Il peut être adapté en fonction de la mise en marché ou d'autres considérations de l'entreprise.

Tableau : exemple de calendrier (simplifié) pour la production de concombres de serre

Période Étapes Délais (jour) Stade physiologique
mi-avril Semis Germination
début mai Espacement final (15 plants/m2) 12 2 feuilles
mi-mai Transplantation 9 4 à 5 feuilles
début juin Récolte 28 Fruits mûrs

Il n'est pas recommandé de repiquer les concombres, car le collet et les racines sont sensibles aux bris. Il est donc souhaitable de les semer directement dans des pots de 10 cm (4 po) que l'on espacera à raison de 15 plants/m² au bout de 2 semaines, ou lorsque les feuilles se touchent.

Quand on transplante, il est important de mettre le sol de la motte des plants au même niveau que le sol de la serre pour prévenir la pourriture du collet. Le concombre est très fragile à des températures du sol trop basses (moins de 18 °C), celles-ci favorisant les attaques de Pythium et entraînant la pourriture du collet. Pour plus d’information sur les principales maladies fongiques responsables de chancres sur la tige et au collet du concombre de serre, voir Lacroix (2003).

La conduite de la culture ressemble à celle de la tomate pour ce qui est de la fertilisation. La taille est différente toutefois. À chaque nœud, on trouvera une vrille, un gourmand et un fruit. En serre spécialisée, il est de mise de tailler les vrilles et les gourmands. Pour les concombre anglais, il est souhaitable de tailler les fruits jusqu'au 7e nœud. Ensuite, on taillera une fleur sur deux, afin de conserver 1 fruit sur chaque 2 nœuds. Cette taille donnera une charge en fruits de 1-0-1-0 si on prend l'exemple sur 4 nœuds. Pour les concombres libanais, il faudra tailler les premières fleurs jusqu'au 5e nœuds. Par la suite, la charge en fruit sera établie en fonction de la vigueur des plants. Plus un plants est vigoureux, plus on gardera de fruits. Il est donc possible de bâtir des séquences de fruits (sur 4 nœuds) de 1-1-1-1, 2-2-2-2, ou même 3-3-3-3. La séquence doit rester simple à expliquer si on travaille avec des employé.e.s.

Quant au tuteurage, les 2 principales méthodes sont en "V", comme pour la tomate, ou en "parapluie". Le tuteurage en "V" permet une bonne répartition de la lumière sur les feuilles, mais est plus facile à opérer lorsque la serre est haute. Il s'agit de la méthode la plus simple à mettre en place et la plus utilisée dans les serres spécialisées. Puisque les concombres poussent de 50cm/mois, il faudra prévoir de les abaisser en cours de production, une tâche qui peut même être réalisée à chaque semaine.

Quant au système "parapluie", il est plus artistique, mais moins prenant en temps. Pour le mettre en place, il faut installer une broche de culture à 1,9m de haut (environ 6 pieds). Lorsque le point de croissance atteint le sommet de la broche, on doit le tailler. On laisse 2 ramifications (gourmands) débourrer à partir des bourgeons axillaires. Le plant formera un "T". Il faut enrouler ces ramifications autour de la broche de culture jusqu'à l'obtention de 3 à 4 nœuds qui retomberont ensuite (ne pas les tuteurer). À environ 1m de haut (mi-hauteur de la broche), il faut tailler à nouveau les têtes et laisser d'autres rameaux secondaires partir du haut. Lorsque la première récolte sera complétée sur les premiers rameaux tombants, il faudra les tailler pour laisser la place aux rameaux subséquents.

Une autre technique consiste à enrouler la tête du plant lorsqu'elle atteint le sommet de la broche afin de la faire courir à l'horizontal. Le plant formera donc un "L" inversé. Une fois que la tête atteindra le plant suivant, il faudra lui couper la tête. On peut alors décider de conserver les ramifications des nœuds 2 et 4 sur l'axe horizontal, que l'on coupera également à mi-chemin du sol. L'idée étant de renouveler les rameaux au fil du temps, afin d'assurer une production constante.

Le concombre doit aussi être effeuillé. Cette tâche doit être adapté en fonction du type de tuteurage utilisé. Dans le cas du palissage en "V", les vieilles feuilles seront dans le bas du plant, tandis que pour la technique parapluie, elles seront en haut. Dans les 2 cas, on priorise de tailler les vieilles feuilles sénescentes, desséchées ou malades, bref, celles qui ne servent plus à rien.

DENSITÉ DE PLANTATION

La densité de plantation d'une culture de concombre doit être adapté en fonction du type de serre. Plus elle est lumineuse, plus la densité sera forte, soit 2,4 plants/m2. À l'inverse, dans une serre moins lumineuse, on peut opter pour une densité de 1,8 plants/m2.

Exemple de calcul pour du concombre libanais à 2,4 plants/m2 :

Serre de 326m2 * 2,4 plants/m² = 782 plants à répartir sur 6 plate-bandes

Dans cet exemple on implantera 1 seul rang où les plants seront espacés aux 20 cm (un peu moins de 8 po) sur le rang et entre les plants.

TEMPÉRATURE DE CROISSANCE

Les plants de concombres sont sensibles aux changements brusques de température. La culture donnera de bonnes récoltes si la lumière est abondante, la chaleur et l'humidité au rendez-vous et si la fertilisation est abondante.

Le tableau suivant résume les consignes climatiques à maintenir (adapté d'OMAFRA, 2010) :

Germination Production des transplants Transplantation Production
Température

diurne (°C)

nocture (°C)

27-28

27-28

24

21

23-25

23-25

23

21

Il s'agit de consignes de base qui peuvent être adaptées en fonction de la luminosité, de l'expérience, du type de serre est des équipements. Par exemple, lors de belles journées ensoleillées, il est souhaitable d'augmenter la température de jour à 26,5 °C et celle de nuit à 22,5 °C afin d'obtenir une température 24h de 25 °C. À l’opposé, lorsque le soleil est absent, on visera une température de jour de 18 °C, de nuit à 18 °C, pour une moyenne 24h de 18 °C. Évidemment, l'application de ce genre de consignes, où l'influence de ensoleillement est pris en compte, est beaucoup plus facile à faire lorsque la serre est automatisée.

RAVAGEURS, MALADIES ET PLANTES ADVENTICES

Les principaux ravageurs du concombre de serre sont les thrips, les acariens (tétranyques), les puceron du melon, les chrysomèles rayées du concombre et les punaises ternes. Les trois premiers peuvent être contrôlés par des méthodes de lutte biologique (Tableau 2). Les fournisseurs d’agents de lutte biologique (voir la liste) sont en mesure de renseigner sur la meilleure stratégie à adopter pour une lutte biologique efficace. Il faut introduire les auxiliaires lorsque le ravageur apparaît. Cela implique un dépistage des ravageurs ailés à l’aide de pièges collants installés au-dessus des cultures et un dépistage des ravageurs qui ne volent pas, tels que les acariens, en examinant périodiquement le feuillage.

Pour ce qui est des les chrysomèles rayées du concombre et les punaises ternes, il n'y a pas de prédateurs connus et les biopesticides pour les contrôler sont quasi inexistants. L'utilisation de moustiquaires sur les entrées d'air (toits, roll-up ou entrée de ventilateur à pression positive) est impératif. Notez cependant que ceux-ci peuvent causer une restriction de la ventilation. Dans le cas de la chrysomèle, celle-ci peut être le vecteur d'une bactérie qui cause le flétrissement bactérien.

Pour plus d’information sur les pucerons et les thrips, voir Lambert (2006) et Lambert (1999a et 1999b) respectivement.

Tableau 2. Ravageurs des cultures en serre et agents de lutte biologique disponibles commercialement1

Ravageurs Agent de lutte biologique
Aleurodes

(mouches blanches)

Amblyseius swirskii (acarien prédateur)

Delphastus pusilus (coléoptère prédateur)

Encarsia formosa (guêpe parasitoïde)

Eretmocerus eremicus (guêpe parasitoïde) ou Eretmocerus mundus (guêpe parasitoïde)

Pucerons Adalia bipunctata (coccinelle 2 points)

Aphelinus abdominalis (guêpe parasitoïde)

Aphidoletes aphidimyza (cécidomyie prédatrice)

Aphidius colemani (guêpe parasitoïde) ou Aphidius ervi (guêpe parasitoïde)

Aphidius matricariae (guêpe parasitoïde)

Coleomagilla maculata (coccinelle 12 points)

Chrysopa carnea (chrysope prédatrice)

Episyrphus balteatus (mouche prédatrice)

Harmonia axyridis (coccinelle asiatique)

Hippodamia convergens (coccinelle)

Acariens

(tétranyques et autres)

Amblyseius fallacis (acarien prédateur)

Amblyseius californicus (acarien prédateur) ou Amblyseius swirskii (acarien prédateur)

Dicyphus hesperus (punaise prédatrice)

Feltiella acarisuga ou Therodiplosis persicae

Phytoseiulus persimilis (acarien prédateur)

Stethorus punctillum (coccinelle)

Thrips Hypoaspis aculeifer (acarien prédateur) ou Hypoaspis miles (acarien prédateur)

Amblyseius cucumeris (acarien prédateur) ou Amblyseius degenerans (acarien prédateur) ou Amblyseius swirskii

Orius insidiosus (punaise prédatrice) ou Orius laevigatus (punaise prédatrice)

Orius majusculus (punaise prédatrice)

Steinernema feltiae (nématode)

Sciarides Hypoaspis aculeifer (acarien prédateur) ou Hypoaspis miles (acarien prédateur)

Steinernema feltiae (nématode)

Mineuses Dacnusa sibirica (guêpe parasitoïde)

Dicyphus hesperus (punaise prédatrice)

Diglyphus isaea (guêpe parasitoïde)

Cochenilles Cryptolaemus montrouzieri (coccinelle)

Leptomastix dactylopii (guêpe parasitoïde)

Chenilles Dicyphus hesperus (punaise prédatrice)

Hypoaspis aculeifer (acarien prédateur)

Posidus maculiventris (punaise prédatrice)

Trichogramma pretiosum (guêpe parasitoïde) ou Trichogramma brassicae(guêpe parasitoïde)

Bacillus thurigiensis var. kurstaki (Bt)

Plusieurs maladies liées à l'humidité excessives peuvent affecter le concombre. Celui-ci peut voir son feuillage ou ses fruits affectés par le chancre gommeux (Didymella bryoniae). L'oïdium ou blanc peut causer de grandes pertes de photosynthèse.

Des taches foliaires causées par les champignons suivants peuvent causer des pertes de production : Corynesporiose (Corynespora cassiicola) ou Cladosporiose (Cladosporium cucumerinum). La bactérie (Pseudomonas syringae) causant la Tache angulaire peut aussi causer des dommages. On peut éviter ou diminuer l'impact de ces différentes maladies en gérant l'humidité dans les serres. On vise un taux d’humidité relative inférieur à 80%.

Un autre champignon affectant les tiges et les fruits peut aussi être présent dans la culture du concombre, il s'agit de la Sclérotiniose (Sclerotinia sclerotiorum). Il faut être particulièrement vigilant contre cette maladie qui peut laisser des scl..rotes dans le sol pendant plus de 10 ans...

La fiche Agriréseau intitulée: Concombre de serre: Différencier les maladies des causes abiotiques présente celles-ci avec plus de détails et solutions.

Différentes maladies racinaires ou de collet peuvent aussi affecter le concombre comme Fusariose vasculaire (Fusarium oxysporum f.sp. radicis-cucumerinum), le pythium spp. Les mauvaises températures de sol à la plantation (inférieure à 20ºC) ou les accidents hydriques (trop d'eau ou irrigation trop tardives) en sont souvent la cause.

Enfin, on note que depuis quelques années la présence d'une maladie virale sévère; Virus de la marbrure du concombre (CGMMV) qui sévit dans les cultures de concombre et comme dans la tomate, cette maladie peut causer des pertes de productions et donner des maux de têtes aux producteurs et productrices touchés. Pour plus d’information sur les maladies des cultures en serre, voir les sites suivants IRIIS (Québec) ou Éphytia (France).

En ce qui concerne les plantes adventices, la stratégie la plus simple consiste à placer des toiles de paillage ou des paillis plastiques épais au sol dans les allées et sur la majeure partie des plate-bandes (Figure 1). Sur les rangs, le désherbage se fait à la main. Il est recommandé de tondre l’herbe au pourtour extérieur de la serre pour éviter l’entrée de ravageurs et de graines de mauvaises herbes. L’idéal est de placer un géotextile (75 à 100 cm de largeur) tout autour de la serre et de le recouvrir de gravier ou de paillis inerte, afin qu’il soit facile d’entretien et éloigne la vermine telle que les rongeurs.

Récolte, emballage et conservation

Les concombres de serre anglais sont généralement récoltés deux à trois fois par semaine, en début de matinée. Leur stade minimal doit être de 28cm de long et de 4cm de diamètre. Pour les libanais, la récolte doit idéalement être réalisée à tous les jours. Dans leur cas, le stade visé est variable d'un cultivar à l'autre (60 à 180g), mais on vise environ 15cm de long et 3 cm de diamètre. À noter que certains cultivars sont plus amers lorsqu'ils sont récoltés plus gros. Rapidement après la récolte, ils doivent être placés au frais et emballés dans une pellicule plastique, pour les garder fermes le plus longtemps possible (la peau étant plus mince que les concombres de champs). Ils peuvent se conserver une dizaine de jours à une température de 10 à 13 °C et à un taux d’humidité de 90 à 95 %. Les fruits sont sensibles à l'éthylène, donc pour en améliorer la conservation, il est préférable de les séparer des tomates.

Autres considérations

Pour la fertilisation et l'irrigation, il est possible de se fier et d'appliquer les recommandations provenant de la culture de la tomate de serre. Toutefois, pour celles et ceux qui désirent aller plus loin, l'accompagnement d'une conseillère ou d'un conseiller est essentiel.

Il faut aussi éviter de mettre des cucurbitacées à l’extérieur près des serres pour ne pas attirer la chrysomèle rayée du concombre et d’autres ravageurs spécialisés. On peut aussi installer des moustiquaires pour empêcher les chrysomèles d’entrer dans la serre.


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