Exigences des normes d’agriculture biologique en matière de compostage

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La France, D. et Duval, J. (2022).

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L’encadré qui suit présente les normes de l'agriculture biologique canadienne relatives au compostage. Un compost fait conformément aux normes biologiques telles que décrites ci-dessous peut être utilisé dans le champ sans délai entre l’application et la récolte. Lorsque le compost ne répond pas à ces exigences, il est considéré comme un fumier. Il faut alors respecter les délais prescrits dans la norme biologique avant la récolte (90 ou 120 jours selon le cas; voir plus bas).

Exigences relatives à la fabrication de compost à la ferme selon les normes canadiennes sur la culture biologique

Le compost produit sur les lieux d’une exploitation doit respecter les critères indiqués au tableau 4.2 Matières destinées au compostage. De plus, si le compost produit sur les lieux d’une exploitation est obtenu à partir de déjections animales ou d’autres sources potentielles de pathogènes humains, il doit :

a) atteindre une température de 55 °C (130 °F) pendant une période minimale de quatre jours consécutifs. Les tas de compost doivent être mélangés ou gérés en assurant que les toutes matières sont chauffées à la température requise pendant le minimum de temps prescrit; ou

b) respecter les niveaux admissibles de concentration de pathogènes humains (NPP/g matières totales) établis dans les Lignes directrices pour la qualité du compost

  • [Coliformes fécaux : moins de 1000 NPP par gramme de solides totaux (base sèche)
  • Salmonella sp. : moins de 3 NPP/4 g de solides totaux (base sèche).]

; ou

c) être considéré non pas comme du compost, mais comme déjections animales mûries ou non traitées, qui rencontrent les exigences de 5.5.2.5 de la norme CAN/CGSB-32.310.


Source : Office des normes générales du Canada. (2020). Liste des substances permises (CAN/CGSB-32.311-2020, Rectificatif no 1, mars 2021). Gouvernement du canada.

La façon habituelle la moins coûteuse de respecter la norme selon le critère a) qui précède est de se doter d’un thermomètre à compost (voir les figures 1 et 2) et d’établir un registre des températures, suite à la mise en andain, pour démontrer que la température exigée (55 °C) a été atteinte pendant quatre jours, ce qui est facile à obtenir. Les thermomètres à compost viennent avec des tiges de différentes longueurs, leur prix augmentant avec la longueur de la tige. On peut utiliser un thermomètre court et moins coûteux en creusant dans le tas de compost avec une fourche pour obtenir les températures. De nos jours, il est facile d’automatiser les lectures de températures en continu en liant un thermomètre électronique à une unité d’enregistrement.

Ghislain Gigi Jutras (2020) | Organisation : Les Jardins du Pied à Terre | Licence : CC BY-NC-SA 4.0 = Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions

Thermomètre du commerce

Ghislain Gigi Jutras (2007) | Organisation : Les Jardins Naturlutte (1.0) | Licence : CC BY-NC-SA 4.0 = Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions

Thermomètre autoconstruit

Figure 1. Thermomètres à compost
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Figure 2. Étapes de fabrication d'un thermomètre à compost artisanal

Le suivi de la température devrait se faire deux ou trois jours après la mise en andain alors que la température maximale est normalement atteinte. Si les 55° ne sont pas atteints on doit essayer de comprendre pourquoi : trop mouillé et manque d’air, très sec, manque d’azote, manque de carbone disponible, densité élevée et manque de structure, matériaux très acides sont les causes communes à corriger. Si les 55 °C sont atteints, une seconde lecture est suffisante quatre jours plus tard (pour rencontrer la norme), car la température ne fluctue pas et ne baisse pas rapidement. Un autre suivi peut être fait au bout de deux semaines pour détecter le passage à la phase mésophile qui est le moment idéal pour un retournement. Ce dernier devrait réactiver les bactéries thermophiles pour un court laps de temps et uniformiser l’exposition des matériaux à leur effet assainissant. On peut aussi vérifier la température à la suite du premier retournement et au besoin par la suite.

À noter que les températures atteintes en surface du tas de compost ne sont jamais aussi élevées qu’au centre du tas. En conséquence, l’inactivation des pathogènes peut être incomplète en ces endroits. On doit donc s’assurer que tous les matériaux iront au cœur du tas lors du retournement.

L’option b), celle de faire tester le produit fini pour la présence de pathogènes humains (salmonelles, coliformes), est relativement coûteuse, mais surtout la norme peut être assez difficile à rencontrer si du fumier a fait partie de la recette initiale de compost.

Enfin, la dernière option, celle de considérer le compost comme un fumier frais, fait en sorte qu’on ne peut pas l’utiliser pour fertiliser des cultures à moins de 90 jours avant la récolte si la récolte ne touche pas au sol, ou à moins de 120 jours si elle touche au sol (légumes-racines, melons et courges). En pratique, en maraîchage, il est souvent difficile de compter sur une minéralisation suffisante du compost l’année même de son application pour assurer les besoins d’azote des cultures. Ces restrictions de temps avant récolte ne sont donc pas si contraignantes qu’elles ne le paraissent puisque l'épandage a souvent lieu l'année précédente, lors de l'établissement d'un engrais vert par exemple.

Les normes biologiques canadiennes indiquent aussi les matières qui sont admises pour le compostage. Voici un extrait.

Liste des substances permises pour le compostage selon les normes canadiennes sur la culture biologique

Les matières acceptables comprennent :

a) les déjections animales obtenues conformément aux exigences prescrites en 5.5.1 de la norme CAN/CGSB-32.310;

b) les produits et sous-produits animaux (y compris les produits de la pêche);

c) les végétaux et sous-produits végétaux (y compris les résidus forestiers et de jardin triés à la source, tels que l’herbe coupée et les feuilles), le marc et les résidus de conserverie;

d) les sols et les minéraux conformes aux exigences de la présente norme et à la norme CAN/CGSB-32.310;

e) les sacs en papier à déchets de jardin qui renferment des encres colorées.

Lorsque des éléments de preuve indiquent que des matières destinées au compostage pourraient contenir des substances interdites en vertu de 1.4 et 1.5 de la norme CAN/CGSB-32.310 et connues pour potentiellement persister dans le compost, il est requis d’analyser le compost avant son utilisation ou de documenter par référence à de la littérature scientifique que les contaminants potentiels seront dégradés pendant le processus de compostage.

Les produits suivants sont interdits comme matières premières pour le compostage : les boues d’épuration, les activateurs de compost et les matières qui ont été fortifiées avec des substances qui ne figurent pas dans la présente norme, les sous-produits du cuir, le papier brillant, le carton ciré, le papier contenant des encres colorées, ainsi que les produits et sous-produits animaux dont on ne peut garantir qu’ils sont totalement exempts de matières à risques spécifiées (MRS).


Source : Office des normes générales du Canada. (2020). Liste des substances permises (CAN/CGSB-32.311-2020, Rectificatif no 1, mars 2021). Gouvernement du canada.

On voit donc que la liste des matières permises est assez vaste. Outre les fumiers d’animaux, bio ou conventionnels, les déchets verts de villes (feuilles, tontes) sont admis. Les normes biologiques suggèrent de prioriser les fumiers produits à la ferme. Elles exigent d’éviter celui des animaux confinés, incapables de se tourner sur 360 °, ou maintenus dans une obscurité constante. Elles suggèrent sans l’obliger d’éviter les fumiers d’élevages hors-sol (fermes ne disposant pas de champs en culture) et celui des animaux consommant des aliments génétiquement modifiés, ce qui recouvre la très grande majorité des fumiers provenant des élevages conventionnels.

Il faut éviter de composter des matériaux qui seraient trop spécialisés, par exemple des résidus industriels ou de la transformation alimentaire conventionnelle, car il pourrait alors être exigé d’effectuer des analyses de résidus de pesticides ou d’autres substances chimiques pour que le compost produit soit accepté en bio. Il faut comprendre que les molécules chimiques artificielles peuvent subir deux sorts lors du compostage : soit elles sont dégradées, soit elles s’accumulent (deviennent plus concentrées) parce que les microorganismes ne peuvent les dégrader.

Les boues diverses (d’épuration, de papetières) ne sont pas acceptées en agriculture biologique. Les chinois utilisaient les excréments humains comme fertilisant (King, 1911), mais l’usage a disparu avec l’arrivée des engrais chimiques. Les risques sanitaires et l’usage généralisé de médicaments, pilules anticonceptionnelles et autres produits pharmaceutiques imposent des restrictions sur leur utilisation, qui n’est, de toute façon, pas autorisée en agriculture biologique.

À noter que les fabricants de composts commerciaux sont soumis aux mêmes règles que les agriculteur·rices qui veulent composter à la ferme quant aux matériaux admis.


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