Choix de la structure et des équipements de serre

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Sommaire du guide

Contexte

Dans une entreprise maraîchère diversifiée, les serres servent principalement à produire les transplants pour les cultures en champ et à allonger la saison de production pour certaines cultures. En production biologique, les cultures les plus populaires et les plus rentables en serre sont les tomates et les concombres. Lorsque leur conduite est bien maîtrisée, ces cultures peuvent donner de hauts rendements en peu d’espace, ce qui devrait amplement payer les coûts de production et, en particulier, les coûts de chauffage de la serre. Plusieurs agriculteur·rices, surtout en formule ASC, produisent aussi des aubergines, des piments, du mesclun, des fines herbes et parfois même d’autres primeurs. Ces cultures sont toutefois moins rentables que les tomates ou les concombres cultivés en serre.

La production de tomates et de concombres pour un·e maraîcher·ère diversifié·e commence typiquement fin mars ou début avril, et se termine en octobre. Il n’est pas encore démontré qu’il serait profitable de produire à longueur d’année en serre, même en mode biologique, en raison des coûts de chauffage et d’éclairage élevés de novembre à février, les mois les plus froids et les jours les plus courts de l’année. Les entreprises spécialisées dans la culture en serre en serre le font tout de même, souvent pour assurer la constance de l’approvisionnement de leurs clients. De toute façon, pour le·a maraîcher·ère diversifié·e, une pause dans la production peut être souhaitable, tant pour la personne que pour diminuer les impacts des insectes et maladies qui se trouvent dans la serre en laissant le gel agir pendant une certaine période.

Structures à privilégier

Une serre individuelle à toit gothique est souvent la structure qui correspond aux besoins d’une entreprise maraîchère diversifiée qui cherche à allonger la saison. Une telle serre a l’avantage, dans nos régions, d’assurer une bonne évacuation de la neige pendant la période où elle n’est pas chauffée. De plus, advenant un problème phytosanitaire dans la serre, celui-ci pourra être mieux circonscrit si on est prudent, et ce, même si deux ou trois serres indépendantes sont ajoutées au cours des années.

En fait, les structures jumelées à toit en pignon ne sont à considérer que si on envisage de développer davantage le volet serre dans l’avenir et si on prévoit produire même en hiver. Elles sont plus faciles à chauffer et le travail y est plus efficace qu’en serre individuelle.

Si on vise principalement une production de tomates et concombres de serre, la serre doit être la plus haute possible (exemple : jusqu’à 6 m sous la gouttière, qui est le point le plus bas entre deux sections). Toutefois, pour les concombres, il est aussi possible de produire dans une serre plus basse si on effectue deux ou trois cultures successives par année.

Les tunnels hémisphériques sont toujours trop bas pour les tomates et les concombres, mais peuvent convenir pour des laitues ou pour allonger la saison de croissance d’une culture de poivrons.

Coût et dimensions des structures

Le prix varie grandement selon la structure et le type de serre choisis. La structure sophistiquée d’un complexe de serres peut coûter jusqu’à plusieurs centaines de dollars le mètre carré (p. ex. 300 $/m2 ou 27,9 $/pi2). Ce n’est pas nécessairement ce qu’il faut pour une entreprise maraîchère diversifiée.

Il existe des structures de serres indépendantes à toit gothique assez bon marché. Pour une serre neuve de ce type, mesurant 29 m sur 7,3 m pour une surface de 212 m2 (96 pi sur 24 pi = 2304 pi2), il faut compter environ 7 000 $ pour la structure et le recouvrement (pellicule plastique double). Après avoir ajouté les coûts des systèmes de chauffage, de ventilation et d’irrigation, le coût à neuf de l’ensemble sera d’au moins 10 000 $ pour 212 m2, soit plus de 45 $/m2 (4,2 $/pi2). Toutefois, il faut aussi considérer les frais de préparation du site (drainage, ajout de meilleure terre parfois, amendements de sol, approvisionnement en eau et en électricité) et, enfin, les frais reliés à la main-d’œuvre requise pour l’installation. Le coût réel d’une serre neuve, même bon marché, peut alors dépasser 100 $/m2 (9,3 $/pi2).

Les frais d’exploitation annuels, surtout les frais de chauffage qui varient selon le coût du combustible et le climat, avoisinent 50 $/m2 (4,6 $/pi2) pour la production de tomates biologiques en serre. Il faut toutefois considérer les revenus bruts potentiels d’une telle serre qui sont de l’ordre de 80 $/m2 (7,4 $/pi2) et plus par année avec une bonne gestion. L’investissement peut donc être rapidement amorti.

Une serre devrait avoir au moins 7,3 m (24 pi) de largeur. Plus le volume d’air d’une serre est grand, plus la température est stable et plus l’air peut circuler. Si, dans un premier temps, la serre est utilisée surtout pour produire des transplants, il est possible de commencer avec une demi-longueur pour ensuite allonger à 29 m (96 pi) éventuellement. Il faut éviter les serres plus longues que 29 m. Une serre très longue est difficile à chauffer et à ventiler uniformément, surtout si on ne dispose pas d’équipement performant. Une serre très haute est aussi plus difficile à chauffer en raison des grandes surfaces de murs exposées au froid.

Autres options que les structures neuves

En période de démarrage, notamment pour une entreprise diversifiée qui doit choisir entre plusieurs investissements, il vaut souvent mieux se procurer une structure de serre usagée. En parcourant les petites annonces classées agricoles et en faisant savoir que l’on cherche une structure de serre dans sa région, il est souvent possible de trouver des aubaines. Parfois, on remarque des structures de serre abandonnées en parcourant les routes (les serres à tabac dans Lanaudière en sont un bon exemple). Si on peut souvent les acquérir à un coût raisonnable, il faut par contre compter les heures pour les démonter. Si les structures sont rouillées, le jeu n’en vaut peut-être pas la chandelle.

Une autre option consiste à construire une structure de serre en bois. Cette option est économique en termes de matériaux, mais pas nécessairement en temps; elle coûte souvent aussi cher qu’une structure usagée en métal. Certaines serres en bois bien construites et bien entretenues peuvent durer longtemps, mais c’est l’exception plus que la règle. Leur point faible demeure le point de jonction avec le sol, là où la pourriture du bois apparaît en premier. Les traitements du bois permis en production biologique sont plutôt restreints (produits de cuivre seulement). Le bois est aussi plus difficile à nettoyer et à désinfecter que le métal. Il laisse aussi passer moins de lumière, la structure étant nécessairement plus épaisse qu’une structure en métal. Il vaut d’ailleurs mieux la teindre en blanc pour réfléchir la lumière.

Système de chauffage

Pour des superficies restreintes (p. ex. moins de 1 000 m2 ou 10 764 pi2), le chauffage à l’huile demeure souvent la meilleure option en raison du faible coût requis pour l’équipement et de sa simplicité. Si un réseau de distribution existe dans la région et que la superficie de serre à chauffer est importante, le gaz naturel peut être plus avantageux que l’huile. Pour rentabiliser un système de combustion de biomasse, utilisant par exemple des granules de bois, il faut une assez grande superficie de culture (plus de 1 500 m2 ou 16 146 pi2) et cultiver pendant les mois froids. Un chauffage au bois classique a peu d’autonomie et demande trop d’attention, surtout la nuit; il peut cependant être une option valable le jour et en soirée en complément à un système de chauffage à l’huile.

Le choix du système de chauffage à l’huile est important. Les systèmes performants (même usagés) doivent convertir au moins 80 % de l’huile en chaleur, c’est-à-dire avoir une efficacité de 80 %. Les systèmes moins performants sont coûteux, polluants et mauvais pour la santé des producteur·rices et des plantes. Il vaut mieux consulter les experts pour le choix d’un système de chauffage; il y a tellement de variables à considérer que les situations doivent généralement être examinées cas par cas. Si on est apte à se débrouiller pour l’entretien et la réparation des appareils de chauffage, on peut évidemment se procurer un appareil de chauffage usagé plutôt que d’investir dans du neuf. Pour être bien guidé dans le choix d’un système de chauffage, voir la fiche Les systèmes de chauffage (Syndicat des producteurs en serre du Québec, 2009).

Il est bon de prévoir un système de dépannage (génératrice, deuxième fournaise, etc.) en cas de bris mécanique ou de panne électrique.

Pour les serres qui sont utilisées en hiver, un système de chauffage du sol à l’eau chaude est à considérer sérieusement, car il peut être rentabilisé facilement.

Ventilation

La ventilation est nécessaire pour bien contrôler la température et l’humidité. Le chauffage joue toutefois aussi un rôle très important pour la déshumidification. En effet, il faut souvent chauffer la serre pour diminuer l’humidité. La ventilation peut être mécanique (avec ventilateurs et entrées d’air mécanisées) ou naturelle (côtés ou toits ouvrants). La ventilation mécanique peut être soit positive (entrée de l’air frais), soit négative (sortie de l’air chaud), ou encore une combinaison des deux.

Les toits ouvrants coûtent plus cher que les côtés ouvrants, mais ont l’avantage de ne pas laisser les ravageurs entrer aussi facilement dans la serre, surtout si on installe des moustiquaires.

« Pendant les grosses chaleurs, les toits ouvrants ne suffisaient pas à assurer une bonne ventilation dans nos serres jumelées. Quand l’air est chaud dehors, l’air chaud de la serre ne sort tout simplement pas par les toits ouvrants. Nous avons dû installer une ventilation mécanique assez puissante et ouvrir un des côtés pour obtenir une aération acceptable. »

Sans investir dans des technologies très sophistiquées, il est possible de relier des thermostats programmables au système de chauffage et à la ventilation. Il s’agit d’oublier une seule fois d’ouvrir la serre pour que la température monte trop haut et que les plants soient affectés. Par exemple, une température supérieure à 30 °C et plus affecte la viabilité du pollen des tomates et compromet la qualité et la régularité de la production.

Recouvrement, isolation et écrans thermiques

Un élément important permettant de réduire les coûts de chauffage d’une serre est l’installation d’un recouvrement de plastique double. Une petite soufflerie électrique est utilisée pour souffler de l’air extérieur entre les deux pellicules plastiques, ce qui assure une couche d’air isolante. Une qualité de plastique dite « infrarouge » garde aussi davantage de chaleur à l’intérieur de la serre. De plus, un plastique « anti-gouttes », même s’il n’a pas d’impact sur l’efficacité énergétique, est indispensable pour diminuer la chute de gouttelettes d’eau sur les plants.

Plusieurs autres mesures visant à améliorer l’efficacité énergétique d’une serre peuvent être profitables à court ou moyen terme. Plus on compte allonger la saison avec une serre, plus il devient intéressant d’investir dans des mesures qui se traduiront par une diminution des coûts de chauffage.

La serre peut aussi être isolée à des endroits stratégiques sans nuire aux cultures. Idéalement, le périmètre extérieur devrait être isolé jusqu’à une profondeur de 60 cm (2 pi) dans le sol avec du polystyrène extrudé bleu dense pour éviter les pertes à travers le sol. L’isolation des murs ne doit pas trop couper la lumière. Les murs au nord peuvent être isolés à leur pleine hauteur (p. ex. 1,8 m ou 6 pi). Pour les autres murs, il faut évaluer les possibilités. On peut utiliser des toiles écrans thermiques, plutôt coûteuses, ou fabriquer des panneaux en polystyrène expansé. On peut aussi adosser une serre au mur sud d’un bâtiment existant. Pour plus de détails sur l’efficacité énergétique des serres, voir Fecteau et al. (2005).

Un autre investissement possible pour améliorer passablement l’efficacité énergétique d’une serre est l’installation d’écrans thermiques horizontaux. Il s’agit de toiles spéciales ou de films plastiques que l’on met en place uniquement pendant la nuit. Ils agissent alors comme faux-plafond, ce qui permet de limiter le volume d’air à chauffer et de réduire les pertes d’énergie par le haut. Selon Jean-Marc Boudreau, ingénieur et enseignant à l’ITAQ (Institut de technologie agroalimentaire du Québec), un écran thermique réduit les coûts de chauffage d’au moins 30 %. Le coût initial des écrans thermiques automatisés étant assez élevé (15-20 $/m2 ou 1,4-1,9 $/pi2), on peut, dans un premier temps, fabriquer soi-même des écrans que l’on placera et enlèvera manuellement. Les écrans thermiques mobiles doivent être ouverts lentement le matin, car l’air très froid qui s’accumule au-dessus des écrans pendant la nuit redescend sur les plants. Il est à noter que les écrans contribuent aussi à maintenir un bon taux d’humidité dans la serre en début de culture, alors que les petits plants ne génèrent pas assez d’humidité par eux-mêmes..

D’autres concepts de serres ont fait l’objet de plusieurs recherches depuis les années 1970 :

  • serres solaires fortement isolées (ex. : serre Brace du collège Macdonald (Figure 2));
  • serres à compostage où la chaleur et le CO2 générés par le compostage à même la serre sont bénéfiques pour les plantes;
  • serres incluant l’élevage de petits animaux ou reliées à un bâtiment d’élevage pour aider au chauffage.

Tout ces systèmes sont surtout applicables à très petite échelle et dans une entreprise qui veut développer un système de production intégré. Les applications commerciales sont limitées même s’il existe des exemples de succès comme celui de la ferme Solviva au Massachusetts.



Figure 2. Serre Brace avec mur plein isolé au nord.



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