Suivi et prise de données

De Wiki maraîcher
Version datée du 2022-12-16T06:45:12 par Ghislain Jutras (discussion | contributions) (A protégé « Suivi et prise de données » ([Modifier = Autoriser uniquement les administrateurs] (infini) [Renommer = Autoriser uniquement les administrateurs] (infini)))

Guide essais variétés Suivi
Aller à :navigation, rechercher
Production


Le contenu qui suit est issu de :

Oeuvre originale : Colley, M., Myers J., Dawson, J., Zystro, J., Healy, K., Behar, H. et Becker, K. (2018). On Farm Variety Trials: Toolkit for Risk Management of Organic and Specialty Crop Producers. USDA Risk Management Agency (RMA), Organic Seed Alliance (OSA), University Wisconsin-Madison, Oregon State Univeristy, eOrganic and the Midwest Organic and Sustainable Education Services (MOSES).

Traduction : CETAB+. (2022). Guide des essais variétaux à la ferme.

Pour contribuer, vous pouvez commenter (en bas de page) ou démarrer une discussion sur le sujet (bouton « … » en haut à droite). Pour modifier le contenu, veuillez contacter les auteur·rices ou écrire à l’équipe du WM. Pour suivre l'évolution de cette page, sélectionnez l'option à cet effet dans le menu "...".



La façon d’évaluer les variétés à l’essai dépend de vos objectifs. Les critères d’évaluation peuvent être généraux ou précis, selon le but de l’essai et le temps disponible. Les agriculteurs étant souvent très occupés, il est préférable de réduire la liste des critères d’évaluation à celui ou ceux qui sont les plus importants (5 ou 6 au maximum). Les critères d’évaluation devraient refléter les aspects clés identifiés au moment de la planification et lors du choix initial des variétés (voir la section Planification de l’essai).

À la fin de cette section, vous serez en mesure de répondre aux questions suivantes à propos de l’évaluation des variétés d’un essai :

  • Quels sont les critères à évaluer?
  • Pour chaque critère, est-il plus approprié de faire une évaluation qualitative ou quantitative?
  • Pour les évaluations quantitatives, vais-je utiliser une mesure directe, une échelle de pointage ou un rang de classement?
  • Quand vais-je procéder à la prise de données?
  • Qui fera la prise de données et si plusieurs personnes sont impliquées, comment vais-je m’assurer que la procédure est standardisée?
  • Comment sera construite ma feuille de prise de données?

Logistique et chronologie de la prise de données 

La prise de données peut se faire à différents moments de la saison pour détecter des aspects importants à différents stades de croissance. Si vous voulez évaluer le taux de germination de plusieurs variétés de carottes hâtives, la première prise de données devrait avoir lieu seulement une ou deux semaines après le semis, lors de la germination. La vigueur des plantules, par exemple, est un aspect particulièrement important en production biologique et doit également être évaluée tôt dans la saison. Chaque variété est évaluée une fois la maturité atteinte, pour s’assurer que les données représentent correctement les variétés. Souvent, toutes les variétés dans un essai atteignent la maturité au même moment, ce qui permet de faire une évaluation de toutes les parcelles à la même date, mais ce n’est pas toujours le cas. Planifier d’évaluer l’incidence des maladies 2 à 3 fois durant la période de croissance permet de constater quelles variétés restent en santé plus longtemps.

Des exemples de feuilles de prise de données et d’évaluation des cultures sont disponibles dans l’annexe F.

L’évaluation des variétés à l’essai se fait grâce à la prise de données, à l’observation et la prise de notes. La prise de données, qui inclut souvent des mesures quantitatives et ordinales (ex. échelles de 1 à 5) sont utiles pour se faire une image claire et détaillée de la performance des variétés pour une caractéristique en particulier. Les notes d’observation sur le terrain donnent un contexte aux données empiriques en résumant les impressions générales, les événements climatiques ainsi que les décisions de gestion qui pourraient influencer les résultats. Ces deux éléments devraient être utilisés de pair dans l’analyse finale des variétés. Il est aussi important que la prise de notes et de données soit faite par la ou les mêmes personnes tout au long de la saison, si possible, pour limiter les biais de perception entre différents observateurs.



Critères d’évaluation à considérer

Les critères d’évaluation des variétés peuvent être reliés à la mise en marché (ex : goût, uniformité), ou encore au niveau des contraintes de production (ex : rendement, capacité d’entreposage). Certains aspects, comme la vigueur des semis et la résistance aux maladies, sont particulièrement chers aux yeux des producteurs et des productrices biologiques.

Les critères d’évaluation possibles incluent :

  • Le goût;
  • Le rendement;
  • La longueur de la fenêtre de récolte (nombre de jours entre la première et la dernière récolte);
  • La compétitivité face aux plantes adventices;
  • Le port de la plante et résistance à la verse;
  • L’uniformité;
  • Le taux d’infection par les maladies ou les insectes;
  • La résistance à la montaison;
  • La conservation et les qualités d’entreposage.

Efficaci-truc

Si la prise de données en cours de saison n’est pas envisageable par manque de temps, il est possible de prévoir une seule séance de prise de données au moment de la récolte et de procéder à l’observation des autres caractéristiques importantes en même temps. La qualité des données est plus importante que la quantité.

Du point de vue du certificateur

Une description claire des caractéristiques que vous recherchez et la documentation qui prouve que celles-ci sont présentes ou non dans les variétés d’essai sont des éléments précieux pour votre organisme de certification. Elles démontrent à votre certificateur que vous recherchez activement des alternatives certifiées biologiques. Une feuille de travail pour l’identification des traits importants et pour documenter vos essais pour votre certificateur se trouve dans l’annexe F.

Évaluation quantitative vs évaluation qualitative

Une fois les critères d’évaluation choisis, il faut décider de la méthode d’évaluation des critères. La plupart des caractéristiques peuvent être évaluées de différentes manières et souvent, il y a un compromis à faire entre la précision des données et le temps nécessaire pour les récolter et les analyser. En général, il faut choisir une méthode d’évaluation qui est suffisamment précise pour vous permettre de prendre des décisions, mais qui reste gérable au niveau du temps nécessaire.

Nous présentons ici quatre catégories de variables utilisées pour étudier nos critères d’évaluation: la mesure directe, le score, le rang de classement et l’évaluation qualitative.

La mesure directe

Premièrement, la mesure directe, qui consiste à quantifier la caractéristique pour chaque parcelle à l’aide d’un outil de mesure. Par exemple, on pourrait utiliser une règle pour mesurer la hauteur des plantes (en cm) ou une balance pour mesurer le rendement (en kg). Cette méthode est précise, mais requiert aussi beaucoup de temps.



Le score

Une autre option est d’attribuer un score à chaque parcelle pour cette même caractéristique, sur une échelle de 1 à 5 ou de 0 à 9 par exemple. Cette méthode simple de quantifier une caractéristique permet une analyse statistique, mais est beaucoup moins précise que la mesure directe. Cependant, cette méthode est habituellement beaucoup plus rapide et, avec un peu de pratique, peut se révéler assez précise. Pour certaines cultures et certaines caractéristiques, attribuer un score à la parcelle est la meilleure option, pour d’autres, il est plus logique d’attribuer un score à chacune des plantes individuellement et de calculer la moyenne. Des échelles de pointage sont souvent utilisées dans les programmes de sélection végétale comme manière de générer rapidement une évaluation numérique des caractéristiques importantes qui seraient trop longues à mesurer exactement.

Le rang de classement

Avec la troisième méthode, le rang de classement, les parcelles sont classées entre elles de la meilleure à la pire. La parcelle la plus productive à l’intérieur d’un bloc, par exemple, se mériterait un « 1 », alors que la moins productive serait dernière. Ces résultats peuvent être facilement interprétés si les variétés obtiennent un classement similaire dans les différentes répétitions d’un essai en blocs. Ils peuvent également être analysés statistiquement, même si c’est un peu plus complexe qu’avec la mesure directe ou le score.

L’évaluation qualitative

La dernière méthode pour analyser une caractéristique et l’évaluation qualitative. Les parcelles sont alors caractérisées selon une description textuelle, comme « rendement exceptionnel » ou « rendement médiocre ». L’évaluation qualitative peut se révéler très informative et très rapide si elle est faite de façon homogène. Un exemple de feuille de prise de données qualitative est disponible dans l’annexe F. Une description qualitative peut aussi permettre de détecter des détails importants pour votre essai ou des changements dans les caractéristiques au fil du temps. Par exemple, une évaluation qualitative d’un essai dans la carotte mauve pourrait être : « Au début de la saison, la variété A avait une belle couleur profondément violette avec des anneaux jaunes concentriques, mais la couleur s’est estompée en entreposage. »



Pour les échelles de pointage comme pour les évaluations qualitatives, il faut faire attention de ne pas regrouper plusieurs caractéristiques dans la même catégorie ou d’avoir des descriptions trop similaires pour celles-ci. Si les parcelles semblent identiques, elles devraient obtenir le même résultat, mais les évaluateurs moins expérimentés ont tendance à éviter les extrêmes (par exemple en ne donnant jamais le score de 1 ou 5 sur une échelle de 1 à 5), ce qui empêche de détecter les différences entre les variétés avec confiance. De la même manière, si tous les spécimens sont décrits comme ayant une « assez belle couleur », vous n’aurez aucune trace des différences subtiles entre les variétés au moment de relire vos notes à la fin de la saison. Ceci risque moins d’arriver avec une mesure directe ou avec un rang de classement, car l’évaluateur est forcé de classer les variétés de la meilleure à la pire, sans possibilité d’égalité.

Du point de vue du certificateur

Les évaluations quantitatives et qualitatives sont toutes les deux utiles pour communiquer les résultats de vos essais à votre organisme de certification biologique. Pour l’information quantitative, assurez-vous de bien expliquer comment les mesures ont été prises et comment les notes ou les classements ont été assignés.

L'échelle du CIAT

L’échelle de 1 à 9 développée par le Centre international pour l’agriculture tropicale (CIAT) est utile et les notes sont faciles à traduire dans un système de classement qualitatif. Les notes sont les suivantes : 1 = médiocre, 3 = passable, 5 = moyen, 7 = bien, 9=excellent. Les chiffres pairs sur l’échelle peuvent être utilisés pour atteindre un niveau de différentiation plus fin. Nous recommandons d’utiliser une échelle d’au moins 9 pour différencier entre les variétés. Avec une plus petite échelle, les notes seront souvent au centre (2 sur une échelle de 3 par exemple) et il ne sera plus possible de distinguer les caractéristiques des variétés.

Efficaci-truc

Attribuez un pointage ou une note aux caractéristiques évaluées au lieu de les mesurer permet de d’économiser du temps (voir évaluation qualitative vs évaluation quantitative).

Prise de données

Bien que le processus de collecte des données varie d’un essai à l’autre et d’une ferme à l’autre, suivre les étapes suivantes vous aidera à garantir la fiabilité et l’exhaustivité de vos données. Avoir à répéter une prise de données est frustrant et chronophage, se préparer pour réussir du premier coup en vaut donc vraiment la peine!

  1. Débutez le processus d’évaluation par l’observation générale des parcelles, afin d’avoir une idée de la variabilité des caractéristiques à l’intérieur de l’essai;
  2. Chaque parcelle devrait être évaluée individuellement. Il ne faut pas mettre en commun les trois répétitions d’un essai en blocs pour l’évaluation sans quoi l’intérêt de la réplication est perdu;
  3. Ayez en main la liste de tous les critères d’évaluation et lors de la prise de données, procédez de façon systématique en évaluant un critère à la fois.
  4. Prenez des notes sur chaque parcelle individuellement. Celles-ci peuvent inclure une évaluation globale ainsi que tout détail qui n’aurait pas été détecté par la prise de données ou même une comparaison d’une parcelle avec une autre (par exemple : « La variété 3 est beaucoup plus productive que la variété 4 »).
  5. Après le processus de prise de données, certaines personnes trouvent utile de classer les variétés selon leur appréciation générale, afin de capturer leur impression finale avant de quitter le champ. Vous pouvez classer les variétés de la pire à la meilleure selon la performance ou, il peut s’avérer utile d’assigner un chiffre à chaque variété selon le potentiel observé, par exemple : 1= cultiver l’an prochain, 2= continuer l’évaluation, 3=ne plus considérer. Notez que l’exercice de prise de notes détaillées et d’évaluation, parcelle par parcelle, aide à remarquer plus de détails et à avoir une meilleure vision d’ensemble de chaque variété à la fin du processus d’évaluation.
  6. Lors de l’évaluation, il faut considérer l’ensemble des plantes de la parcelle comme un tout plutôt que de baser son jugement seulement sur le meilleur ou le pire de la population. Cela s’applique quand on fait une mesure directe et lorsqu’on attribue un score. Lors de la mesure directe d’une caractéristique, il est idéal de mesurer toutes les plantes d’une parcelle et d’ensuite calculer la moyenne. Si le nombre d’individus est trop élevé, il faut sélectionner un sous-échantillon de façon aléatoire.
  7. Assurez-vous que la feuille de prise de données est datée et que le nom de l’évaluateur ou de l’évaluatrice s’y trouve. Dans la mesure du possible, il est recommandé d’évaluer toutes les parcelles à la même date et de ranger les feuilles de prise de données dans un endroit sûr où elles pourront être retrouvées facilement à la fin de la saison.


Efficaci-truc

Réservez un carnet de notes, calepin ou dossier exclusivement pour la prise de données et pour les notes sur les essais. Trouvez un endroit pour le ranger dans votre grange, bureau ou camion et assurez-vous de le remettre à sa place après chaque évaluation.

Évaluation sensorielle

Les chercheurs en sélection variétale et les fermier·ères voient de plus en plus l’intérêt d’évaluer des caractéristiques sensorielles telles que le goût, afin d’assurer que les cultures ne soient pas seulement productives, mais aussi très intéressantes pour les consommateur·rices. L’évaluation sensorielle peut être faite de manière très simple, en goûtant une racine, feuille ou fruit au hasard provenant de chacune des parcelles, ou plus de manière plus complexe en incluant des notes et des descriptions sur les saveurs distinctes ou des caractéristiques visuelles. Inviter les employées de la ferme, les abonnés de panier, les clients du marché ou les restaurateurs locaux dans une évaluation sensorielle peut être une excellente façon d’inclure différentes perspectives dans la prise de données, tout en constituant une bonne occasion d’éducation et de rayonnement. Les producteurs qui se spécialisent dans les cultures de transformation peuvent décider d’évaluer une sauce, une choucroute, un pain, une bière en collaboration avec leurs clients. Il est aussi possible de profiter d’un point de chute de panier ou d’un événement comme une porte ouverte pour conduire un test de goût.



L’analyse descriptive vs l’analyse hédonique.

Dans le domaine des sciences de l’alimentation, l’évaluation sensorielle est souvent réalisée dans des environnements de laboratoire contrôlés, avec des panels de spécialistes du goût hautement qualifiés. Ce niveau de normalisation n’est ni possible ni nécessaire à l’échelle d’un essai à la ferme. Un élément de la science de l’analyse sensorielle qu’il est important de considérer, cependant, est la différence entre l’analyse hédonique et l’analyse descriptive. L’analyse hédonique évalue les préférences des gouteurs en leur demandant, par exemple, à quel point ils aiment la saveur d’un certain échantillon. L’analyse descriptive, de son côté, demande au dégustateur de faire abstraction de ses préférences et de se concentrer sur la caractérisation objective des traits en question. Si vous souhaitez inclure à la fois des questions hédoniques et descriptives dans votre évaluation sensorielle, prévoyez de séparer ces questions. Lorsqu’un dégustateur identifie un échantillon comme étant celui qu’il aime ou qu’il n’aime pas, cela peut fausser la façon dont il décrit l’échantillon ou vice versa. Un exemple de fiche d’évaluation sensorielle est disponible à l’annexe F.



Astuces pour les tests de goût

Les tests de goût sont la forme la plus courante d’évaluation sensorielle. Concevoir un test de goût et analyser les résultats peuvent sembler simple, mais les conseils suivants vous permettront de garantir la fiabilité de vos résultats.

  1. Goûter les cultures au moment de leur pleine maturité. Si le temps de maturité des variétés testées est variable, essayez de trouver une fenêtre dans laquelle toutes les variétés auront au moins quelques feuilles, fruits ou racines complètement mûrs.
  2. Être conscient des effets du climat. La saveur de certaines cultures est fortement affectée par la pluie, l’intensité lumineuse ou les changements de température. Soyez conscient de la façon dont ces facteurs peuvent affecter votre culture à l’essai et prévoyez de goûter toutes les variétés le même jour (si possible) afin de minimiser l’influence des variations météorologiques sur leur goût.
  3. Obtenir un échantillon représentatif de la parcelle. Le fait de goûter un seul fruit ou une seule feuille de chaque parcelle peut fausser votre perception de la performance globale d’une variété. Évitez de goûter des échantillons qui ne sont manifestement pas représentatifs de la variété, comme des fruits endommagés, malades ou pas assez mûrs.
  4. Être attentif à la santé et à la sécurité. Selon vos pratiques agricoles, il peut être dangereux de goûter des cultures sans les avoir lavées au préalable. De même, si vous préparez une dégustation, soyez conscient des facteurs de risque associés au fait de laisser des aliments non réfrigérés pendant de longues périodes.
  5. Identifier les variétés avec des codes inconnus des goûteurs, pour éviter que ceux-ci n'influencent les préférences de ceux-ci.
  6. Décourager les évaluateurs de communiquer entre eux. Les dégustateurs peuvent facilement influencer l’opinion des autres en parlant de leurs impressions.

Après avoir recueilli les données de votre essai, vous aurez peut-être l’impression d’avoir une assez bonne idée de la façon dont les différentes variétés et votre variété témoin se comportent et se comparent. Vous pouvez envisager d’ignorer l’analyse des données et de vous référer seulement aux chiffres bruts quand vous en aurez besoin. On peut apprendre beaucoup en intériorisant simplement ses impressions sur l’essai, mais l’analyse des données permet de vérifier ses impressions par rapport à ses observations réelles, ce qui permet d’obtenir des informations concrètes pour guider la prise de décision.

Une réalisation de

Centre d'expertise et de transfert en agriculture biologique et de proximité
Coopérative pour l'agriculture de proximité écologique
L'Odyssée bio de Gigi
Procédurable